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Revue internationale de criminologie et de police technique et scientifique
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30 march 2016 | Revue internationale de criminologie et de police technique et scientifique 01/2016

Causes de la radicalisation à travers le recrutement du Hizbullah turc: quelles pistes de prévention?

par Murat Gülver et Altay Manço

La décision de verser dans le terrorisme varie d’une personne à l’autre, même si certaines matrices communes peuvent être décelées dans les argumentaires. Le profilage des personnes susceptibles d’être influencées par le discours des terroristes est une étape importante dans la lutte contre le terrorisme. Il est toutefois impossible de dresser un profil commun aux terroristes à motif religieux, trop de facteurs affectant les membres potentiels de ces organisations: origine, place dans l’histoire et le système politique du pays concerné, place dans le système d’éducation et qualité de ce dernier, compréhension du message religieux, caractéristiques de l’éducation religieuse, conditions socio-économiques de l’individu et de sa région, etc. Selon la plupart des théories criminologiques, la famille, l’école, les pairs et la communauté en général sont des acteurs de premier plan en matière de prévention de la criminalité et de socialisation. Par ailleurs, de nombreuses études ont montré que l’éducation augmente la résistance face à la criminalité. Aussi, nous examinons l’idée de l’action socio-éducative ciblée afin de réduire la menace terroriste religieuse à long terme, à travers les processus de radicalisation et de recrutement d’une organisation terroriste islamique en Turquie. Ces dernières années, le terrorisme à motif religieux est devenu une menace de plus en plus croissante dans ce pays. Bien avant cette période, durant les années 80 et 90, le Hizbullah turc fut la plus grande et la plus violente des organisations terroristes à motif religieux de cette région jusqu’aux opérations policières réalisées à Istanbul au début de l’an 2000 et ayant permis de démanteler le réseau. Malgré l’existence d’analyses journalistiques, peu de travaux scientifiques ont été menés sur ce groupe. Nous étudions les «autobiographies» des membres du Hizbullah destinées au comité central du mouvement et censées motiver leur adhésion. Ces documents sont dictés ou rédigés (entre 1992 et 1998) par les intéressés en réponse à un questionnaire prévu par les dirigeants du Hizbullah. Ils contiennent des informations sur le passé familial, scolaire et professionnel, ainsi que sur les relations des adhérents. Ces 356 textes autobiographiques correspondent aux dépositions de 85 % des membres arrêtés du Hizbullah. L’analyse de ce corpus est complétée par 22 entretiens réalisés, en 2008-2009, avec des policiers, des chercheurs, des enseignants, des imams, des responsables d’écoles coraniques, dans diverses villes turques. Ces interviews approfondies avec des témoins choisis pour leur expérience dans le domaine ont servi à examiner, à nuancer et à détailler les résultats. Elles ont également aidé à réfléchir à des méthodes proactives pour la prévention de l’extrémisme religieux. Si nos constats sur les facteurs de radicalisation et de recrutement ne sont valables que pour le Hizbullah, ils peuvent cependant inspirer des initiatives pour empêcher des individus de se joindre à des organisations terroristes, en général.